"Mon modèle était devenu obsolète aux yeux du monde médical": à Roquefort-les-Pins, le rude combat d’Olivier Guglielmo pour changer sa prothèse

Deux tiges métalliques solidement ancrées dans le fémur et le tibia, sur lesquelles s’emboîte au niveau du genou une myriade de pièces en polypropylène. "C’est cette prothèse qui me permet d’avoir une vie à peu près normale", glisse Olivier Guglielmo en désignant sa jambe maintenue par une orthèse.
Victime d’un grave accident de la route en 1986, le Roquefortois, aujourd’hui âgé de 55 ans, avait pu bénéficier d’une pose totale de prothèse au CHU de Saint-Étienne. "Le docteur Bousquet m’a sauvé la vie", répète-t-il, reconnaissant. Seule contrainte: Olivier devra faire remplacer le mécanisme trois à quatre fois au cours de sa vie. Une intervention qu’il subit sans difficulté en 1995, dans le même établissement. Mais lors de la seconde opération, les choses se compliquent. L’entreprise française Serf, qui fabriquait les prothèses, est rachetée par l’américain Stryker, qui décide de stopper la production des pièces. "Entre-temps, les technologies avaient évolué, rappelle le quinquagénaire. Mon modèle était devenu obsolète aux yeux du monde médical et, de ce que j’en comprends, plus assez rentable." En octobre 2023, faute de mieux après une opération déjà reportée, il passe tout de même sur la table: "Le remplacement de la prothèse à Nice par le chirurgien Trojani, qui suit de près mon dossier, n’a pu être que partiel."
"Je suis en sursis"Affaibli par une infection bactérienne postopératoire toujours pas guérie, Olivier sait que la prothèse – déjà fragilisée – ne pourra tenir sans le remplacement total de celle-ci. Faute de quoi il risque jusqu’à l’amputation. "C’est une option inenvisageable et inadmissible", pose avec un calme contenu le père de famille, qui se dit bien soutenu par son entourage malgré une situation physique et psychique difficile. En arrêt de travail, le quotidien d’Olivier tourne presque qu’autour de cette prothèse: "Je suis en sursis jusqu’en septembre, date à laquelle Stryker devrait à nouveau créer quelques prothèses. Même si j’essaye de rester optimiste, c’est très dur pour moi d’attendre dans l’incertitude. Je ne me sens pas considéré, voire dénigré."
Le début d’un collectif?Loin d’être seul dans cette situation angoissante, le Roquefortois s’inspire des combats menés par d’autres patients en France. Comme celui de Fabrice Robin, un Vendéen qui, selon 20 Minutes, a fini par obtenir gain de cause après un an et demi de lutte contre le géant américain. Une victoire qui reste toutefois exceptionnelle, l’entreprise assurant par communiqué collaborer avec les chirurgiens au cas par cas et uniquement sur sollicitation de ces derniers. "J’ai été plus résigné que Fabrice je dois avouer, du moins au début", confie Olivier, qui a depuis tenté de contacter le député antibois Éric Pauget et affirme avoir reçu le soutien du maire de Roquefort-les-Pins, Michel Rossi.
L’espoir revenu, il envisage de créer une association "pour rassembler les patients concernés et faire entendre notre voix". Olivier le sait: il se bat aussi pour l’avenir. "Si je vis vieux, je devrais encore changer ma prothèse. Et si ce n’est plus possible?"
Nice Matin